Les origines familiales de Georges Canguilhem et ses années de formation (1904-1929)


Georges Jean Bernard Canguilhem est né le 4 juin 1904 à Castelnaudary, 29 cours de la République, de Marie-Louise, née Tissandier, et de Bernard Canguilhem. Son père exerçait à son domicile la profession de « coupeur d’habits » (comme l’indique l’acte de naissance de Georges), c’est-à-dire tailleur, comme son père avant lui, Jean-Marie Canguilhem, activité professionnelle qui se maintiendra dans la famille avec André (1909-1996), le deuxième frère de Georges, qui aura son atelier de tailleur sur mesure à Castelnaudary, rue Barbès (actuelle rue du Maréchal Foch) où la famille emménage durant la petite enfance de Georges.
Du côté de sa mère on était des paysans mais, précise Georges Canguilhem, « d’un degré au-dessus, c’est-à-dire administrateur de grandes propriétés et connaissant à la perfection la machinerie américaine qui commençait à arriver » (OC, V, p. 1296). Son grand-père, Bernard Tissandier (1822-1910), fut à la fois « homme d’affaires » (d’après le recensement communal), expert agricole, régisseur de grands domaines. Né à Lafage, petit village situé à une vingtaine de kilomètres au sud de Castelnaudary, aux confins de l’Ariège, il y possédait la terre de Béziat, qu’il laissera à sa mort à sa fille Marie-Louise. Georges Canguilhem restera attaché sa vie durant à ses origines et son terroir.
 

Acte de naissance de Georges Canguilhem
Crédits : Michel Dauzat
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Maison natale
Crédits : Michel Dauzat
Maison, 5 rue du Maréchal Foch à Castelnaudary
(1ère en partant de la droite)
 
Collège de Castelnaudary
 

Il suit une brillante scolarité. M. Claux, un des enseignants du collège de Castelnaudary, qui a perçu l’étendue de ses capacités intellectuelles, convainc ses parents de l’inscrire dans un grand lycée parisien afin qu’il se prépare au concours d’entrée à l’École normale supérieure, une intervention dont il lui sera toujours reconnaissant.
Alain (1868-1951)

Reçu au baccalauréat en 1921, il entre cette même année en khâgne au lycée Henri IV pour trois ans d’études, financées en partie par une bourse d’internat. Son professeur de philosophie est Émile Chartier, plus connu sous son nom de plume Alain (1868-1951). Malgré une grave divergence à la fin des années trente sur la question de la paix, Georges Canguilhem restera fidèle en amitié à son maître jusqu’à la mort de celui-ci.

En août 1924, il est reçu 17e à l’École normale supérieure. Parmi ses autres condisciples, citons Jean-Paul Sartre (1905-1980), Raymond Aron (1905-1983), l’écrivain et journaliste Paul Nizan (1905-1940), Daniel Lagache (1903-1972), psychiatre et psychanalyste, Alfred Péron, écrivain, spécialiste de littérature anglaise, ou encore l’helléniste et épigraphiste Louis Robert (1905-1985). La promotion 1924 est restée dans les annales de l’École comme « la promotion miraculeuse », avec aussi du côté scientifique, Louis Néel (1904-2000), prix Nobel de Physique en 1970, ou encore les mathématiciens Jean Dieudonné (1906-1992) et Charles Ehresmann (1905-1979) qui comptent parmi les membres fondateurs du groupe Bourbaki. Les anciens élèves d’Alain constituent, au sein de l’École, un groupe animé par Georges Canguilhem. Avec Sartre en particulier, il organise des canulars, notamment lors de la Revue annuelle qui, en 1927, tourne au scandale. La même année, il est reçu second à l’agrégation de philosophie.

Avant toute affectation dans un lycée, il doit accomplir son service militaire qui, commencé en novembre 1927, se terminera en avril 1929. Dans sa correspondance avec ses amis, notamment avec Jean-Richard Bloch (1884-1947) – correspondance publiée dans les Œuvres complètes (vol. 1) –, il exprime des opinions antimilitaristes virulentes.
Dans la revue d’Alain, Libres Propos, créée par Jeanne Alexandre (1890-1980) et Michel Alexandre (1888-1952), il publie régulièrement et anonymement des Notes militaires ou Notes d’un soldat, tout aussi critiques sur l’armée. Selon son expression, « il quitte la livrée » le 26 mars 1929, après avoir noué quelques amitiés solides dont celle avec José Zermati (1910-1979). Il va alors pouvoir enfin se consacrer à l’enseignement.
Trombinoscope de l'ENS, Promotion 1924 (Lettres)
ENS-Paris, Bibliothèque Ulm-LSH, PHO D/2/1924/1
Trombinoscope de l'ENS, Promotion 1924 (Sciences)
ENS-Paris, Bibliothèque Ulm-LSH, PHO D/2/1924/1